Fauda (*) : immersion passionnante et justesse de ton

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La série Fauda diffusée sur Yes et Netflix, composée à ce jour de 3 saisons de 12 épisodes a de quoi déranger BDS et autres bien-pensants influencés par ces derniers, à plus d’un titre. Mais Fauda remet aussi les pendules à l’heure sur une réalité nuancée de l’ennemi pluriel d’Israël, grâce à l’irremplaçable connaissance du terrain en immersion totale. Le principal héros protagoniste, le magnifique Doron alias Lior Raz, co-créateur de la série, ainsi que le journaliste reporter Avi Issacharoff , furent tous deux formés à bonne école, anciens membres de l’Unité d’élite Duvdevan, et désireux de nous en offrir ici un scenario au plus proche de l’expérience du terrain.

Lior Raz et Avi Issacharoff

Cette série haletante et efficace, pépite à l’état brut, est interprétée sans fards avec talents, pudeur et sensibilité.

 

Elle rappelle en premier lieu que l’État hébreu investit pour sa sécurité des moyens humains d’élite, commandos et personnels de traque et surveillance, des matériels pour protéger h24 et 7/7 le Am Israël de ses ennemis environnants et impliquer le moins de pertes civiles possible du côté adverse. Parmi ces gardiens de l’ombre, l’élite de l’élite combattante, prennent des risques inouïs et n’abandonnent jamais ni la mission, ni un des leurs. Ils ne reculent ni devant la douleur, les tourments et les sacrifices, même après les avoir durement expérimentés, ni devant la peur, sentiment qui culmine à juste titre dans l’isolement sécuritaire de Gaza.  Leur efficacité, ruse, inventivité, leurs compétences linguistiques et aptitudes d’assimilation caméléons, sont inégalées.

 

Loin des clichés réducteurs, l’amour familial est le socle refuge, des 2 côtés israélien et « palestinien ». L’homme d’action, le combattant, appuie son équilibre en prenant épouse. La place de la femme est donc centrale de part et d’autre, et les enfants sont choyés. Ce qui diffère de manière fondamentale néanmoins, c’est la place de la mission, qui côté arabe, peut revêtir, quand la situation ou le fanatisme prend le dessus, un intérêt supérieur à la vie. Il est réducteur de laisser croire qu’il règnerait de ce côté arabo-musulman un mépris de la vie des siens. La famille est bien un joyau que l’on protège au mieux, mais à la différence du côté Juif,  il y a soumission à quelque chose de plus grand – ainsi qu’il est dit, « Allahou akbar » – qui place le chahid, même de sa propre famille, moins comme un vie dramatiquement fauchée que comme une mort utile au combat, glorifiée et gratifiée au centuple par « Allah ».

 

Quelle est donc la mission du combattant palestinien ? Clairement, il est question de ne plus tolérer de présence Juive à leurs portes, ni sur la terre d’Israël. « Du Jourdain à la mer », le Jihad, parmi lequel le devoir de combat sera d’œuvrer pour y parvenir, par des pertes civiles et militaires. Concrètement, les Juifs sont désignés par le terme « sionistes », dans un sens différent que celui employé en Occident (chez nous, par méconnaissance, hypocrisie et pour ne pas directement pointer du doigt les Juifs). Le sioniste est compris ici dans son sens strict : le Juif, déjà malmené et honni dans plusieurs versets du Coran, est doublement haï s’il vient résider en Israël (désignée comme « Palestine » de manière anachronique), la justification du sionisme étant celle du Retour, impliquant une présence passée largement étayée par l’archéologie, et répondant à une promesse biblique. Ce peuple de retour sur cette terre, c’est un aveu d’antériorité de religion, ce sont des prémices d’accomplissement de Torah (Géoula) que les musulmans ne sauraient tolérer. Le peuple Juif muni de sa Torah (de plus en plus observons-nous dans le réel au sein de l’armée) sur sa Terre, manifeste une puissance créatrice, économique, scientifique, militaire et tactique, et un rayonnement décuplés, bénéficiant quand la situation semble l’exiger, de renforts irrationnels….

 

Ces accomplissements menacent d’invalider ou mettre à mal les autres Religions du Livre ; l’une, chrétienne, poignarde Israël dans le dos au travers de ses instances onusiennes et européennes, de ses dirigeants et ses media. L’autre, musulmane, renforcée par le DÎN, via le jihad, dont le devoir de combat est illustré dans cette série. Plus ou moins consciemment, en « territoires palestiniens » – Judée, Samarie, Âza (mais aussi Jordanie…) le Juif est haï de manière irrationnelle. Les faits, l’histoire, la « Bible » dont les patriarches sont repris et revisités en Islam, la géopolitique, la politique annihilatrice affirmée du Hamas opposée aux tentatives de négociation, tous les faits balaient pourtant les arguments d’une légitimité palestinienne sur les territoires de Canaan.

Nous voyons tout naturellement au travers des tranches de vie si réalistes de cette série Fauda, mais bien sûr aussi avant tout par le témoignage au quotidien de la vie en Israël, que la haine palestinienne est sans fondement, irrationnelle, aveugle et sourde. Elle n’en est pas moins tenace. Côté Israélien, cette haine, sans réciprocité à l’échelle du pays, est ressentie parfois comme une blessure fratricide, du moins est-ce exprimé de manière forte dans cette série Fauda.

Les relations arabo-israéliennes, à travers lesquelles se renouent plus ou moins consciemment les liens ancestraux entre Ishmaël et Yitzhak, sont dans cette série, du point de vue Juif le plus sincère, fraternelles et fusionnelles. [Quand bien même leur patriarche paternel commun n’est pas le même homme à la naissance de l’un et de l’autre enfant, animé d’un souffle supplémentaire à la naissance d’Ytzhak qui bénéficiera de ce fait d’un éclairage le propulsant dans une dimension inaccessible aux Ishmaélites]. Une fraternité forte à rendre jaloux les occidentaux d’inspiration chrétienne, qui malgré leur dhimmitude forcenée et leur politique pro-arabe éhontée, ne parviennent à obtenir qu’un respect poli de façade, entre 2 attentats. D’après la série, Israël peut compter, selon ces bases fraternelles, sur une forte coopération de la police de l’AP.

Cet attrait fraternel est parfaitement restitué et communicatif dans la série, rythmé par des gestes rituels religieux, renforcé par le plaisir de joies familiales et amicales simples et de rapports idéalement clairs et sans détours, où la matérialité n’est pas dominante et ne corrompt pas les cœurs blasés. Ces images de fiction réalistes, renvoient à l’accueil réel des communautés arabes au sein du peuple israélien jusque dans son armée, sa Knesset (où l’islamistophile peut librement appeler à la perte d’Israël), ou composant pour moitié son personnel hospitalier, etc… dans les faits, Israël est en déclaration d’amour permanente à son frère arabe, sans franc succès jusqu’ici. Cet amour le plus souvent unilatéral, transpire dans la manière de filmer non manichéenne de la série.

Pour autant, quand le ressentiment palestinien prévaut et qu’il n’y a pas de point de rencontre possible, ces relations possiblement profondément idylliques dans leur essence, sont le fruit bancal de l’infiltration juive, tricherie à visée utile, vitale, sans malignité ni malveillance collatérale. Ce mensonge imposé par le survivalisme, est indissociable d’une volonté réelle de rapprochement, d’apaisement, de préservation des vies de part et d’autre. Il est question d’épargner les vies innocentes, en premier lieu desquelles les femmes et enfants lors d’attaques préventives dans le camp adverse. Une forme de respect impose, chaque fois que cela est possible – c’est-à-dire quand le combattant arabe en devenir n’a pas franchi une limite assassine sans états d’âme, et hors extrême urgence – de négocier une sortie où la vie est préservée. Mais, selon une juste mesure, il n’est fait aucun quartier – brutalité salutaire bien ordonnée et assumée – pour des hommes mêlés de près ou de loin au terrorisme et à des projets d’attentat. Il peut arriver que la haine palestinienne gagne la partie… le travail israélien est de veiller à ce que les rares inévitables « victoires » ennemies soient restreintes et sans lendemain, et à ce qu’en cas de défaite ennemie, le ressentiment soit circonscrit.

Un combattant Arabe « palestinien » infiltré découvert ou kidnappé est ainsi interrogé très durement selon l’imminence d’attentats dont il est partie prenante sans états d’âme ni intention de parler, mais reçoit des garanties pour les siens s’il coopère, on peut même leur offrir une nouvelle vie sous des cieux plus cléments (Jordanie, Égypte, voire Europe !) s’il renonce au combat ou fournit des indications cruciales.

En revanche, un combattant Juif infiltré découvert ou kidnappé se retrouve dans un enfer où on lui retirera toute humanité, et à moins d’une exfiltration in extremis, il n’a plus qu’à espérer une mort rapide. Dans les faits, un civil Juif ne peut survivre sans protection armée en « territoire palestinien », tandis qu’un civil arabo-musulman ou un palestinien non agressif ne craint ni pour sa vie, ni pour son intégrité physique ou familiale en Israël.

Photo depuis un bus israélien, à l’entrée d’un territoire palestinien – prise par Marie Autesserre

Les images des artistes en représentation promotionnelle ne trompent pas : la camaraderie fraternelle entre sémites Arabes et Juifs est souvent très concrète en Israël. La complicité des acteurs de l’Unité d’élite israélienne, est également une réussite et un gage de qualité.

Sans surprise et comme le rapporte la série Fauda, il n’y a pas en revanche de réelle unité au sein du « peuple palestinien », qui s’il est presque autant composite qu’Israël, regroupe en revanche des intérêts divergents voire franchement opposés, sans ciment fédérateur ni dénominateur commun constructif. Hamas, Jihad islamique, percées de Daesh ou gens du peuple, les divisions et luttes de clans affectent et affaiblissent la lutte. A quoi il faut ajouter que le peuple, qui majoritairement hait les Juifs ou au mieux n’éprouve aucune compassion, n’a pas pour autant, tant qu’il n’est pas touché directement par « l’ennemi », vocation au martyr – Et c’est heureux. De là, se confirme que la matérialisation d’un ennemi commun ne suffit pas à consolider une identité nationale forte.

En Israël et dans les territoires dits palestiniens, le chaos gagne, de manière provisoire, à l’endroit et au moment où l’action sécuritaire des commandos Juifs ne parvient pas à déjouer ou apaiser le lourd travail de la haine antisémite et antisioniste. Si puissante et renforcée soit la haine adverse, une inflexion positive pour Israël ne vient ni ne viendra pas directement de la puissance de l’ennemi. Si Israël est unie et se surpasse, Fauda, le Tohu Vabohu, laissera place à l’harmonie, BZH.

En attendant, là où tout se voit à l’envers, les gouffres sont amers…

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Une nouvelle série prometteuse Hit and Run, co-écrite entre autres par les mêmes auteurs passionnés que la série Fauda, est sortie le 06 août. Bientôt, sort la tout aussi attendue Saison 4 de Fauda. Hâte de s’y plonger.

Par Marie Autesserre

(*)  en arabe translittéré (فوضى ), signifie « chaos »

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