Le 30 juin 2022, les députés ont voté la dissolution de la Knesset, ouvrant la voie à de nouvelles élections législatives (prévues le 1er novembre 2022), les cinquièmes en moins de 4 ans. La fragile coalition dirigée par le Premier Ministre, Naftali Bennett a perdu le soutien de députés, empêchant l’adoption de nouveaux textes. Pendant la période intercalaire, le Ministre des Affaires étrangères, Yair Lapid, sera Premier ministre par intérim. La paralysie contemporaine résulte incontestablement d’un oubli, par les députés, des dispositions de la Loi fondamentale sur la Knesset de 1958, et de celui de la vocation d’Israël : être l’État-nation du peuple juif.
Théoriquement, les représentants du peuple agissent conformément au mandat qui leur a été confié. Or, un écart s’est progressivement creusé entre leur mission législative et leur préoccupation personnelle. Constituée, non autour d’un axe idéologique dans l’intérêt du pays, mais du seul principe, « tout sauf Bibi », la coalition composée de députés de la droite nationaliste, de socialistes, de l’extrême gauche, voire de députés islamistes s’est naturellement trouvée bloquée.
Parmi les éléments déclencheurs, figure le vote de la Loi visant à prolonger le statut administratif des juifs résidant dans les implantations juives de la zone C de Cisjordanie (sous contrôle administratif et militaire israélien en vertu des accords de paix israélo-palestinien). Une mesure temporaire, renouvelée tous les 5 ans, place les mityachvim sous la juridiction israélienne, non plus sous la juridiction militaire. Or, faute de renouvellement de la mesure, ils ne relèvent plus de la juridiction israélienne. Le vote a illustré les incohérences du fonctionnement de la Knesset.
Au sein de la coalition, le Meretz (gauche) a soutenu le vote de ce texte (contrairement à sa lignée idéologique) alors que deux députés arabes, membres de la majorité, ont refusé de le voter (alors qu’ils sont censés respecter la philosophie de la majorité qu’il représente). Inversement, le Likoud et le parti sioniste religieux de Bezalel Smotrich ont voté contre alors que pour les mityachvim (qui les soutiennent) ce renouvellement était très important.
De même, la coalition a soutenu un projet de loi (émanant de l’opposition) offrant une priorité pour les emplois au sein de la fonction publique, aux personnes non juives ayant fait leur service militaire au sein de Tsahal. Les députés arabes de la Knesset de la coalition ont voté contre, conduisant à l’exaspération du Ministre du Logement Zeev Elkin : « nous ne travaillons pas pour le parti Raam ». Pour sa part, le député Likoud Michey Zohar qui soutenait le texte a déploré : « nous ne pouvons pas diriger un Etat fondé par des juifs pour les juifs avec des partenaires antisionistes ».
Finalement, Nir Orbach, député du parti Yamina de Bennett a donné sa démission (tout comme l’avait fait Idit Silman en avril). Il reprochait à Ghaida Rinawie Zoabi (Meretz) et Mazen Ghanaim (Raam) de tenir la coalition en otage.
Point positif : l’attitude incohérente des responsables politiques n’empêche pas l’Etat d’Israël de poursuivre sa gestion des biens sans maître de la zone C de Cisjordanie : l’implantation de Homesch, évacuée par l’ancien premier Ministre Ariel Sharon, est de nouveau habitée par des juifs israéliens alors que les Palestiniens de Massafer Yatta (sud de Hebron) sont sur le point d’être expulsés, puisque implantés sur une zone d’entraînement militaire.
Néanmoins, la multiplicité des partis, conjuguée avec le principe « tout sauf Bibi », interdit Israël de prendre ses grandes orientations stratégiques. Pire, l’Etat juif est devenu « un canard sans tête » parfaitement déboussolé, tout comme l’illustrent les revirements de position du Ministre de la Justice Gideon Saar.
L’ancien allié de Benjamin Netanyahou a quitté le Likoud en 2020 et juré qu’il ne siègerait plus jamais à ses côtés. Saar avait d’ailleurs expliqué que la création du parti Tikva Hadacha, l’était pour « empêcher le retour au pouvoir de Netanyahu et l’asservissement des intérêts de l’État à son intérêt personnel ». Néanmoins, et pour éviter la dissolution de la Knesset, Gideon Saar a changé de stratégie : il a indiqué à Benjamin Netanyahou qu’il n’était pas hostile à la formation d’un gouvernement alternatif en cas de démission du gouvernement de Bennett…
Les membres de la Knesset sont élus au scrutin proportionnel intégral et les sièges sont attribués aux partis qui reçoivent plus de 3.25 % des voix. Il conviendra donc de trouver de nouvelles alliances, compatibles avec la vocation de l’Etat juif.
Selon un récent sondage, le Likoud pourrait obtenir 36 sièges (soit sept de plus que dans la précédente Knesset). Pour sa part, l’alliance sioniste religieuse de Ben Gvir (dirigé par Bezalel Smotrich) est gratifiée de 10 sièges (pour une nouvelle génération de juifs religieux, il incarne la vision d’un État juif, par les juifs, pour les juifs).
S’il entend diriger le prochain gouvernement, il conviendrait, pour Benjamin Netanyahou, de rallier les 15 députés manquants. L’inconvénient résulte de la multiplicité de déclarations racistes de responsables politiques qui lui sont proches. Craignant ne pas trouver de solution avec les populations arabes israéliennes, le député de l’opposition Itamar Ben Gvir a appelé à expulser « l’ennemi arabe ». Pour sa part, le ministre de la coalition, Matan Kahana, a exprimé le souhait de disposer « d’un bouton magique qui enverrait les citoyens arabes israéliens en Suisse ». De telles déclarations ne sont pas de nature à donner confiance aux députés modérés.
Pour éviter le blocage institutionnel, sûrement conviendrait-il (dans un premier temps) de s’en tenir au strict respect des Lois fondamentales israéliennes. La Loi fondamentale du 19 juillet 2018 a fait d’Israël, l’État nation du peuple juif. Son article 1er précise, en substance (dans son deuxième alinéa) : « L’État d’Israël est le foyer national du peuple juif, dans lequel il exerce son droit naturel, culturel, religieux et historique à l’autodétermination ». Le principe ne saurait donc être plus clair. Les députés sont donc liés par cet objectif que l’État d’Israël s’est assigné.
Par ailleurs, la qualité de député de la Knesset suppose le respect de conditions que l’Etat d’Israël doit impérativement faire respecter : la Loi fondamentale sur la Knesset du 12 février 1958 a tout d’abord mis à la charge des députés une obligation de déclarer allégeance à l’Etat d’Israël par une formule qui se présente de la manière suivante « Je promets de faire allégeance à l’Etat d’Israël et de m’acquitter loyalement de mon mandat à la Knesset » (article 15).
Pour sa part, l’article 16 de la loi fondamentale, prive le député de la Knesset de ses prérogatives attachées au statut, tant qu’il n’aura pas effectué cette déclaration. Mieux, l’article 16 A interdit aux députés d’avoir une double allégeance : en pareille hypothèse, le texte exige qu’ils se libèrent de l’autre nationalité, leur interdisant de déclarer allégeance à l’État d’Israël tant qu’ils ne s’en seront pas libérés. De même, le texte prévoit une privation de leurs droits de membre à la Knesset avant toute déclaration sur ce point (article 16 A loi 12 février 1958).
Il devrait donc être interdit pour des députés de la Knesset de revendiquer le statut de « palestiniens de la Knesset ». L’Etat juif doit donc faire respecter ses lois et principes fondamentaux, à défaut, c’est qu’il ne se respecte pas lui-même, ni son peuple.
Je suis assez surpris car j’ai souvent eu l’occasion de lire des articles très pertinents de Maître Ramas- Muhlbach qui commet ici l’erreur souvent commise par les Juges de la Cour suprême israélienne à savoir de faire du droit en ne tenant pas compte du contexte particulier ou de l’abus de droit. La Cour suprême a fait détruire des maisons sous prétexte que des arabes israéliens n’avaient pas accepté les offres israéliennes de construire ailleurs sans tenir compte du fait que les arabes israéliens qui auraient accepté ce compromis intéressant financièrement pour eux risquaient d’être condamnés à mort par l’Autorité palestinienne. C’est inadmissible (en plus en gras) et scandaleux de parler de “déclarations racistes” de proches de Netanyahu qui font allusion à des déplacements de population alors que (quasi) tous les députés arabes ne reconnaissent pas Israël comme Etat juif et donc ne respectent pas les Lois fondamentales de l’Etat d’Israël, comme , d’après les sondages, plus de 70% de la population arabe israélienne. Pour rappel, des déplacements de populations musulmanes ont été organisés par l’ONU lors de l’indépendance de l’Inde pour créer un Etat indien et 2 Etats musulmans, l’un à l’ Est et l’autre à l’Ouest de l’Inde.