Dans un premier temps, chez les Palestiniens, on aurait volontiers applaudi Poutine.
Nombre de dirigeants, dont le président Abbas, ont fait des études à Moscou. Du temps de la guerre froide, l’Union soviétique avait apporté une aide précieuse à l’Organisation de Libération de la Palestine. À cours des dix dernières années, la Russie s’est rapprochée du Hamas à Gaza, en partie parce que l’Iran, son allié, en est le principal soutien. Si bien que monsieur Fayez Abu Shamala, écrivant dans « Falastin » a souhaité une victoire décisive au maître du Kremlin avant de tweeter « J’espère que la ville de Londres connaîtra le même sort ».
À Ramallah, on a d’abord choisi prudemment de se taire. Et puis voyant que non seulement l’Occident avait choisi son camp, mais encore que l’attention du monde fût tout entière tournée vers le drame ukrainien et le combat de ce pays contre l’envahisseur russe, les Palestiniens ont compris qu’ils devaient faire quelque chose.
La solution ? Proclamer « Ukraine, Palestine, même combat » et s’indigner de l’indifférence des pays occidentaux qui se refusent à le reconnaître. Pour La Chronique de Palestine :
« Pourquoi chacun d’entre eux n’applique-t-il pas le même principe à la Palestine et aux Palestiniens ? Le peuple de cette terre occupée n’a-t-il pas droit à sa propre intégrité territoriale et à sa souveraineté sans devoir subir la réalité des incursions armées quotidiennes de l’État agressivement colonial d’Israël, un pays qui n’a jamais déclaré ses frontières parce que son idéologie sioniste fondatrice exige son expansion constante dans les pays voisins, et pas seulement sur la terre de Palestine ? »
Une argumentation qui n’a guère était suivie.
Le pire était à venir. L’immense élan de solidarité provoqué par les images tournant sur les chaines de télévision occidentales – les femmes, les enfants, les vieillards fuyant les horreurs de la guerre, contribue à « dé-prioritiser » les réfugiés palestiniens, pour reprendre les termes de Philippe Lazzarini, l’homme qui est à la tête de l’Unwra depuis deux ans. Une situation catastrophique d’autant que l’organisation souffrait depuis quelque temps d’une grave crise financière.
Philippe Lazzarini, Unwra
Les donations qui maintiennent à flot cette organisation commencent à se tarir alors qu’elle doit maintenant subir la concurrence des réfugiés ukrainiens. Philippe Lazzarini n’hésite plus à en évoquer la fin ; Pour lui, ses tâches pourraient être réparties entre plusieurs autres institutions des Nations Unies et notamment par le Haut-Commissaire des Nations Unis pour les réfugiés.
Une solution qui aurait dû être adoptée il y a bien longtemps pour mettre fin à une anomalie qui dure depuis bientôt trois quarts de siècle.
Loin d’aider les quelques sept à huit cent mille réfugiés palestiniens de 1948 à se réinsérer dans les pays arabes voisins, dont ils partageaient la culture et la langue et souvent des liens de famille, cette institution a contribué à les maintenir parqués dans des camps par des dirigeants arabes qui les ont instrumentalisés dans leur combat contre l’État juif.
Pour mémoire, les huit cent mille juifs chassés des pays arabes n’ont jamais bénéficié d’une telle sollicitude et sont pourtant aujourd’hui tous intégrés dans leurs pays d’accueil. Reste que l’on peut s’attendre à une levée de boucliers de la part de toutes les organisations palestiniennes pour lutter contre ce qu’elles ne manqueront pas de qualifier de sinistre complot sioniste.
À suivre…
© Michèle Mazel pour Dreuz.info.
Michèle Mazel est diplômée de Sciences-Po et licenciée en Droit, et a été boursière Fullbright en science politique.
Pendant plus de trente ans, elle a accompagné de par le monde son mari, le diplomate Zvi Mazel, qui fut notamment ambassadeur d’Israël en Egypte, en Roumanie et en Suède.
Elle en a tiré la matière de nombreux ouvrages – thrillers et romans. Elle contribue régulièrement à plusieurs organes de presse.
Arrêtez de parler de camps palestiniens. Ce sont plutôt des villes, en dur.