L’annulation des élections palestiniennes, recette pour une 3ème Intifada?

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La violence éclatera-t-elle si Abbas annule les élections palestiniennes?

Mahmoud Abbas,photo au Bureau du Président de l’Autorité nationale palestinienne via Flickr CC

BESA Center Perspectives Paper n ° 2,012, 30 avril 2021

RÉSUMÉ EXÉCUTIF: Le Hamas et d’autres groupes terroristes menacent de violences à Jérusalem et dans les territoires, si Mahmoud Abbas annule les élections au Conseil législatif palestinien prévues le 22 mai. Cependant, les données de Google Trends sur la baisse de popularité du Hamas et du Fatah suggèrent qu’une éruption de violence est peu probable.

Lors d’une récente réunion à Gaza, les dirigeants de bon nombre des 36 listes en lice pour les élections au Conseil législatif palestinien prévues le 22 mai ont averti Mahmoud Abbas, chef de l’Autorité palestinienne, que la violence allait probablement éclater s’il annulait les élections sous prétexte d’un refus israélien (qui n’a pas encore été exprimé) de leur permettre d’être organisées à Jérusalem.

Les partisans du Fatah devront choisir parmi trois listes : une liste officielle du Fatah fidèle à Abbas; une liste opposée dirigée par le transfuge du Fatah Muhammad Dahlan, originaire de Gaza, qui réside et est soutenu par les EAU ; et une liste formée par Nasser al-Qidwa, le gendre de Yasser Arafat, mais dirigée (au moins nominalement) par Marwan Barghouti, l’ancien chef du Fatah Tanzim emprisonné depuis 2002 pour son implication dans de nombreux meurtres d’Israéliens. Le Hamas est uni derrière une liste: Notre Rendez-Vous à Jérusalem.

Abbas est bien conscient que ces mêmes divisions (sans compter les violences internes au Fatah à cette époque) ont conduit à une victoire écrasante du Hamas aux élections de 2006 et ont abouti à la perte de Gaza au profit de ce groupe à partir de juin 2007. S’il permet le élections à venir, l’histoire risque de se répéter.

Abbas semble donc coincé entre le marteau et l’enclume – voué aux gémonies s’il annule les élections et damné s’il ne le fait pas. Mais s’il le faisait, ferait-il vraiment face à l’éventualité d’une intifada interne?

À en juger par les données générées par Google Trends sur la base de termes de recherche liés aux élections, une telle intifada ne semble que très peu probable.

Nous avons commencé par taper la phrase «Élections palestiniennes 2021» en arabe. Les résultats révèlent une excitation initiale suivie d’un intérêt en baisse rapide, probablement parce que les Palestiniens comprennent, qu’étant donné les relations hostiles entre les deux plus grandes factions, le Fatah et le Hamas, et les gouvernements respectifs qu’ils contrôlent, le processus électoral, plutôt que de remédier à la fracture, ne va probablement que l’exacerber d’autant plus (voir la figure 1).

Figure 1: Recherches sur «Élections palestiniennes 2021» en arabe au cours de l’année écoulée (Google Trends)

En fait, il y avait si peu d’intérêt que les recherches n’ont pas généré suffisamment de données pour fournir une ventilation géographique, ce qui aurait permis une comparaison entre l’Autorité palestinienne et Gaza ou entre le nord de la Cisjordanie (Naplouse-Jénine-Tulkarem), où se trouvent les bastions du Fatah, vraisemblablement les plus forts, et Hébron dans le sud (forte présence du Hamas).

Le processus électoral n’a, pas non, plus suscité d’intérêt accru parmi les deux protagonistes les plus importants, le Fatah et le Hamas. Les courbes de recherche générées étaient sensiblement les mêmes avant que la question des élections au Conseil législatif ne se pose, comme elles l’étaient dans la période beaucoup plus brève après laquelle les élections ont été annoncées (voir la figure 2).

Figure 2: Comparaison entre les recherches du Fatah (bleu) et du Hamas (rouge), du 3 mai 2020 au 28 avril 2021 (Google Trends)

À première vue, il semble que les divisions au sein du Fatah n’aient pas affecté l’importance relative et l’identification probable de l’opinion publique avec l’organisation, par rapport au Hamas et que le Fatah l’emporterait probablement aux élections.

Mais une telle analyse ne tient pas compte du fait que la moitié des sièges du Conseil législatif sont disputés dans des circonscriptions plurinominales dans lesquelles gagnent ceux qui obtiennent le plus de voix. Ainsi, si un district est représenté par quatre membres, les quatre candidats qui ont obtenu le plus de voix dans le district deviennent ses représentants. Comme il y a plus de sept candidats en lice pour chaque siège, de petites différences peuvent signifier une victoire ou une défaite. Les partisans du Hamas dans un district donné soutiendront massivement leurs candidats dans ce district par rapport à la circonscription divisée du Fatah, conduisant, comme il l’a fait en 2006, à une victoire écrasante du Hamas.

Même si le Fatah devait l’emporter sur le Hamas aux élections, il pourrait être gravement affaibli par rapport aux autres listes. La comparaison des recherches du Fatah et du Hamas depuis 2004 révèle une forte baisse d’intérêt pour les deux factions depuis 2015, probablement due à la fatigue du fait que les parties en guerre ne parviennent pas à une sorte d’arrangement politique qui mettrait fin à leur rivalité ( inqisam ).

Figure 3: Comparaison des recherches sur le Fatah (bleu) et le Hamas (rouge) depuis 2004 (Google Trends)

Il ne fait aucun doute que le Hamas fera tout ce qui est en son pouvoir pour faire campagne en vue de lancer une Intifada dans le territoire contrôlé par Abbas si la décision est prise d’annuler les élections. Abbas continue de faire arrêter et de harceler les dirigeants et partisans du Hamas, la coordination de la sécurité entre Israël et l’AP a été entièrement rétablie et les promesses faites par Abbas de réembaucher ou d’indemniser les employés – supposés être devenus des partisans du Hamas – qui ont rejoint le service gouvernemental avant que le Hamas ne prenne le contrôle de Gaza n’ont pas été tenues .

Pourtant, alors que l’antipathie du Hamas envers Abbas est à son plus haut point, il manque de crédibilité et de ressources pour déclencher une Intifada dans la zone que contrôle l’AP. La récente flambée du COVID-19 à Gaza et son déclin relatif au sein de l’Autorité palestinienne ont porté atteinte à la crédibilité dont jouissait le Hamas avant qu’il ne commence à diriger le territoire de Gaza (jusqu’à 2007), et la coordination de la sécurité entre Israël et l’Autorité palestinienne a fortement entamé la capacité du Hamas à mobiliser les Palestiniens à Djénine, Naplouse, Ramallah et Hébron.

Abbas se ferait donc une faveur (et renforcerait son pouvoir toujours chancelant) en annulant les élections. En secret, le Hamas est probablement d’accord avec Abbas, étant donné le déclin du soutien au Hamas ces dernières années dont il anticipe les mauvais effets électoraux.

Heureusement pour les deux groupes, Israël peut toujours être désigné responsable de l’échec de l’expérience démocratique des Palestiniens depuis un quart de siècle et de leur mouvement national centenaire. Ses épaules, elles, sont solides…

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2 commentaires

  1. Abbas n’a pas intérêt a ce qu’il y ait d’élection !!! Ca fait déjà 15 ans qu’il usurpe le pouvoir sans que personne ne vote pour qui que ce soit !!! Aujourd’hui sous un prétexte fallacieux, Abbas a justement intérêt a ce qu’il n’y ait toujours pas d’élection pour garder le pouvoir jusqu’à sa mort et remplir de la sorte son compte en banque sur les dons étrangers qui pleuvent !!! La vraie question qu’il faut se poser c’est a qui profite l’annulation de l’élection ??? A Abbas bien sur qui est en plus sur a 100% de sauter si il y a élection car il est évident que la majorité votera pour quelqu’un d’autre que lui !!!! Israël est pris comme bouc émissaire pour rejeter la faute de l’annulation de cette élection alors qu’en ce moment même Abbas s’en frotte les mains et en plus en poussant les palestiniens a tuer du Juif INNOCENT en Israël faussement accusé sur ce coup !!! Et c’est exactement ce que les palestiniens ne manquent pas de faire en ce moment !!!!

  2. Pour être heureux, ne vivons surtout pas cachés : cela pourrait être la devise de Mahmoud, dont l’action concrète pour le fonctionnement d’un État palestinien est inférieure à zéro, mais dont les subsides dépendent de ses apparitions à l’écran, dans le rôle de la victime expiatoire de tous les péchés d’Occident.

    Il y a une équation que semblent oublier tous les dirigeants mondiaux, dont l’objectif est de se concilier certains votes en échange d’un soutien inconditionnel à « la » Palestine : c’est le fait que seul, le tenant du titre de Président touche les chèques. Et donc qu’il n’a pas intérêt à accepter que se tiennent des élections qu’il ne gagnerait pas.

    C’est basique, mais cela n’a pas encore pénétré l’épaisse couche de préjugés bienveillants qui matelasse l’intellect palestinolâtre.
    https://mabatim.info/2021/05/03/palestine-elections-piege-a-yakafaukon/

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