Droit de réponse
Publié le 26/01/2021 à 15:35
Le 18 janvier, Jack Lang faisait son mea culpa au micro d’Europe 1, 43 ans après la signature d’une tribune pro pédophilie. En impliquant, à tort, d’autres personnalités qui n’avaient pas signé, comme Catherine Dolto. En colère, cette dernière lui répond.
“C’était une autre époque, c’est une connerie“. Le 18 janvier dernier, l’ancien ministre de la Culture Jack Lang est contraint à un mea culpa au micro d’Europe 1, 43 ans après la signature d’une tribune pro pédophilie. Dans ce texte publié alors dans Le Monde, le gratin de la gauche intellectuelle défendait trois personnes accusées “d’attentats à la pudeur sans violence sur mineurs de quinze ans“, c’est-à-dire de pédophilie.
“On était très nombreux à l’époque à signer ça, explique alors sur les ondes Jack Lang. C’était Daniel Cohn-Bendit, c’était Michel Foucault, c’était une série d’intellectuels”. Problème : les deux hommes ne faisaient pas partie des signataires. Et d’enchaîner : “Si on ouvre le débat, à l’époque nous n’étions pas seuls à dire cela, il y avait même des personnes éminentes, je pense à Catherine Dolto, même si elle était prudente, à professer ce genre d’appréciation. Ce n’est pas mon sentiment aujourd’hui”. Autre problème : Catherine Dolto n’avait pas non plus paraphé la tribune.
PLAINTE POUR DIFFAMATION
Dans un communiqué dont Marianne a eu connaissance, Catherine Dolto réplique aujourd’hui : “Jack Lang tente de diminuer cette faute en accusant d’autres d’avoir aussi signé ou approuvé ce texte. Parmi les noms cités : moi, Catherine Dolto.
Mensonge éhonté ! Je suis révoltée qu’il m’accuse de manière infamante d’avoir soutenu des actes et des idées que j’ai toujours fermement combattus. Tout le monde peut vérifier facilement que je n’ai ni signé, ni approuvé cette pétition. Chercher à s’absoudre de sa propre faute en associant à son comportement le nom de personnes réputées pour leur combat en faveur de l’enfance est navrant. J’accorde trop de crédit à l’intelligence de Jack Lang pour ne pas prendre au sérieux cette attaque à mon égard. C’est pour cela que j’ai demandé à mes conseils de porter plainte pour diffamation contre Jack Lang afin que la justice rétablisse la vérité.“
Se pourrait-il cependant que Jack Lang ait confondu Catherine Dolto avec sa mère, Françoise, pédiatre et psychanalyste ? Cette dernière n’a certes pas non plus signé la tribune du quotidien du soir. Bien au contraire : l’année même de sa publication, elle condamnait clairement la pédophilie et estimait que l’initiation sexuelle “des adolescents et des enfants par un adulte (donc par garçon ou fille de 16 ans déjà), en admettant même que ce partenaire ne soit pas incestueux, encore plus si cet adulte est confirmé en âge et en prestance, est toujours un traumatisme psychologique profond” (selon une citation tirée de La Justice en procès, de Jean Bérard, publié aux Presses de Sciences Po en 2013).
La confusion pourrait en revanche être liée à la signature par la pédiatre, trois mois plus tard, d’une tribune signée par quatre-vingts autres intellectuels et intitulée “Lettre ouverte à la commission de révision du code pénal”. Le texte est écrit par… Gabriel Matzneff, qui sera accusé quarante ans plus tard de pédophilie. Toujours dans le quotidien du soir, les signataires se questionnent sur l’âge auquel les enfants et adolescents peuvent être considérés comme capables de donner librement leur consentement à une relation sexuelle.
Début 2020, au moment où éclate l’affaire Matzneff, un article du Canard Enchaîné exhume les propos tenus par la pédiatre lors d’un entretien dans le journal de Gisèle Halimi, en novembre 1979. Questionnée sur les viols incestueux de pères sur leurs petites filles, elle affirme : “Dans l’inceste père-fille, la fille adore son père et est très contente de pouvoir narguer sa mère !”, puis : “Il n’y a pas de viol du tout, elles sont consentantes”. Et ce, avant de poursuivre : “C’est l’interdit de l’inceste qui valorise la sexualité. Cet interdit intervient quand l’enfant désire l’inceste, c’est-à-dire à partir de trois ans jusqu’à 13 ans environ. Quand tout se passe bien, la sexualité se déplace et ne se fixe plus sur le père ou sur la mère. Le fait qu’un enfant doit faire plaisir à ses parents est déjà une forme d’inceste.“
Auprès du palmipède, Catherine Dolto défend alors sa mère, déclarant qu’il s’agit de “citations tirées de leur contexte, dans lesquelles François Dolto parle de l’inconscient et non du registre du conscient”. “Tous ceux qui connaissent son œuvre et sa personne ne sauraient accorder le moindre crédit à ces dénonciations calomnieuses avait-elle écrit par la suite dans un billet de blog. Françoise Dolto a toujours défendu farouchement la cause des enfants et il est bien évident que défendre les pédophiles ne pouvait faire partie de ses combats.“
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Ce milieu est opaque ,leurs avocats aussi.